samedi 29 décembre 2018

De multiples possibilités d'évolution

Les possibilités de développement intérieur sont multiples, et l’homme depuis qu’il reçut une âme puis a chuté de son statut divin a exploré de multiples possibilités d’évolution, souvent alimentées, nourries ou révélées par de grands prophètes, avatars ou missionnés divin, ou tout simplement des êtres éveillés tel l’a été le Bouddha. 

Toutes ces possibilités de développement présentent parfois des points communs, d’autres fois de grandes différences, qui se mélangent en diverses proportions. Ce qu’il faut comprendre c’est qu’il n’y a pas un axe unique d’évolution. Ce qui est offert à l’homme est multiple, et les possibilités de réalisation sont multiples, avec toutes leurs caractéristiques. Il est pratiquement impossible dans une vie d’homme de pouvoir aborder tout ce qui existe dans ce domaine. Aussi la tendance est de se spécialiser dans une direction particulière, vers une réalisation particulière, et à partir de celle-ci, éventuellement explorer les autres domaines, sachant que cette exploration est sans limite, car le Divin peut toujours ouvrir à l’homme de nouvelles possibilités d’évolution.


Parmi toutes ces possibilités il s’en trouvent certaines qui sont rattachées à la croissance de l’âme, comme les voies christiques par exemple, d’autres qui sont lié à la nature de l’esprit, telles les démarches bouddhistes, ou de la conscience, telles les voies de la réalisation du soi. Mais toutes ces voies sont très différentes l’une de l’autre, ne donnent pas le même résultat, et ne concerne pas les mêmes parties de soi dans leurs développement. Et souvent nous les confondons, faisant des amalgames d’où il est difficile d’extraire une compréhension cohérente, ou même créant un système de compréhension pour unifier les contradictions, mais qui n’a plus rien à voir avec la réalité des choses. 



La confusion vient du fait que peu d’individus ont réalisé la grande unité de l’existence, et l’on se focalise en général sur l’un ou l’autre de ces mouvements. Globalement ceux qui se rattachent à Dieu et à la croissance de l’âme parlent plutôt d’action, qui est l’action de l’âme. Il faut bien le comprendre, car Dieu nous envoie toujours vers le monde, et l’âme se sauve aussi en sauvant les autres. Alors que ceux qui se rattachent à l’éveil de l’esprit parlent plutôt de contemplation et du non agir, qui est la non action de l’ego, il faut bien le comprendre. Ce chemin est issu principalement du bouddhisme mais pas seulement. 

Mais les deux ne sont pas contradictoires, ils se complètent même harmonieusement, car l’action de l’âme n’est jamais aussi efficace que quand l’ego se tait. Et l’esprit n’est jamais autant lucide que lorsque Dieu nourrit l’âme à travers l’action. Les deux mouvements pour une mutation accélérée sont indispensables l’un à l’autre. 

Quant à la réalisation du soi, elle contredit l’extinction du soi qui a lieu dans les voies bouddhistes ou même christique. Pourtant toutes ces choses ont un sens et se complètent parfaitement. Ce sens ne peut être découvert et compris dans son essence que dans l’expérimentation. Et c’est encore dans l’expérimentation que l’on peut créer la grande unité de la Vie et des multiples possibilités qui s’offrent à l’humain. L’approche intellectuelle, idéaliste, ou simplement métaphysique ne peuvent suffire sans une profonde expérimentation.

Jean-Michel Jutge


dimanche 2 décembre 2018

La plénitude



Sortir du temps, c’est mourir à soi-même, ce soi qui est une construction issue du temps. Mais ce n’est pas l’esprit qui meurt. C’est la construction du passé, le moi, l’identité arbitraire, auxquels s’identifie l’esprit. Cela commence par se rendre compte de ce qu’est l’identification.


Il n’y a pas de but préétabli à l’existence, qu’elle soit plénière ou de souffrance. Le fait est que l’homme est enfermé dans son esprit et ses conditionnements, tout cela le coupe de la vie.

Parfois pendant un bref moment ou une période plus ou moins longue, pour des causes diverses, on se retrouve dans une situation d’ouverture, de lâcher prise, ou même parfois de Grâce, de plaisir, de joie ou d’amour intense, où quelque chose de vivant se remet en marche. Mais tant que l’esprit n’a pas trouvé sa liberté, ces moments restent ponctuels et dépendent à la fois de circonstances extérieures et intérieures, Ils ne découlent pas de notre liberté. Il existe toutes sortes de méthodes d’ouverture, pour nous faire comprendre ce que sont les fondements de l’existence et nous sortir de l’illusion, qui n’est pas une faute morale mais un défaut structurel de notre nature.

Etre pleinement vivant, dans une vie renouvelée à chaque instant, ce devrait être la norme de l’être humain, non l’exception. Il n’y a pas de but à la vie, elle est son propre but. Demander s’il y a un but à une expérience de plénitude, ce serait comme demander pour quelqu’un qui serait tout le temps malade, s’il y a un but au fait qu’il se retrouve pendant un certain temps en bonne santé. La santé est la norme. C’est la maladie qui est un problème. Il nous faut apprendre à ne plus être malade.

L’accomplissement d’une expérience de plénitude, c’est lorsque celle-ci est complètement intégrée, qu’elle fait partie de nous au point que l’on ne s’aperçoit même plus, ou si peu qu’elle est là. Comme la santé que nous vivons naturellement.

Le vide intérieur est devenu la norme pour la plupart et c’est aussi en vivant par moment quelques instants d’harmonie que l’on s’aperçoit de l’existence de ce vide. Le problème n’est pas alors de retrouver l’harmonie, l’expérience plénière, une fois passée elle ne revient plus, mais de comprendre la nature et les causes de ce vide. Ce sera comme de régler la maladie. La plénitude de l’existence devient alors la norme pas parce qu’on l’aura cherché, mais parce que l’on aura compris les mécanismes internes de l’illusion, de la souffrance, et que l’on ne s’y frottera plus.

De toujours figer l’expérience, cela fait partie des mécanismes de l’esprit. Il n’y a ni bien ni mal à ce mécanisme, c’est un fait hérité de la survie, et on ne nous apprend pas autre chose. Chacun le fait, c’est ce qui forme la personnalité, avec au centre ce qu’on appelle l’ego. Tant que ce mécanisme n’a pas été vu dans son entier, l’esprit, et quel que soit l’apprentissage, aura toujours tendance à figer la connaissance. La connaissance, ou l’expérience, c’est la même chose. L’esprit libre n’a pas de référence, mais il est disponible pour voir le vrai.

J’en viens donc au temps. Si nous voulons vivre l’esprit libre, non identifié au passé, au présent ou au futur, c'est-à-dire un esprit qui ne se trouve pas dans la projection, qui ne vit pas d’images, de concepts, d’expériences, mais qui choisit de vivre la réalité sensible et sensorielle de l’existence, il faut comprendre comment cet esprit s’identifie au temps, car toute l’image, toute la conscience construit en permanence le temps.



Pour cela rien ne vaut quelques petits exercices :

Fermez les yeux et essayez de sentir votre main, juste sentir, ne rien projeter, sentir la forme des doigts, leur volume, les sensations qui les habitent, tout ce que l’esprit peut percevoir juste par la sensibilité. Cela c’est la perception. 

Elle n’a lieu que dans le présent. On ne peut percevoir une réalité du passé ou de l’avenir, à moins d’être médium ou de passer par Dieu qui est au-delà du temps, mais cela c’est autre chose.

Un autre exercice, écoutez de la musique, l’enchainement des sons, l’harmonie etc, sans rien projeter. Là encore c’est l’esprit qui perçoit ce à quoi il est attentif, ça passe par les sens, on ne perçoit que le présent.

Ne vous contentez pas de lire et de comprendre, expérimentez-le et voyez ce que je veux dire.

Maintenant après avoir expérimenté la perception directe de votre main (ou d’autre chose), essayez de vous souvenir ce que vous aviez perçu lorsque vous étiez attentif à votre main. La totalité de ce que vous vous rappelez, c’est ce que votre conscience a conservé, c'est-à-dire l’image qu’elle a créée de l’évènement. Cette image n’est plus l’évènement, l’expérimentation, elle est une image du passé. Mais si elle devient la référence de votre main, c'est-à-dire si vous dites, « ma main est comme cela » en vous référant à cette image, vous ne vivez plus la réalité de votre main, vous vivez sur une cristallisation du passé. 

Et c’est la somme de toutes les prises de conscience et images que nous mettons bout à bout et que nous fixons d’instant en instant qui crée la perception du temps. Si vous restez présent à votre main et à tout le reste sans vous préoccuper des prises de conscience et sans vous attacher aux images créées, l’esprit ne construit plus le temps, vous êtes dans un présent perpétuel, il n’y a qu’une réalité. C’est simple à comprendre, mais il faut s’en rendre compte dans les faits. L’esprit cesse alors de s’identifier, de chercher, de s’attacher à l’image, aux souvenirs, à ce qui lui a procuré du plaisir. Il vit uniquement dans la perception du réel.

Il faut comprendre que la tension liée à l’image est elle-même souffrance, car elle coupe l’énergie et fini par la bloquer complètement. La vie, les émotions, les sensations, sont alors en vide. Et pour combler ce vide l’esprit est obligé de créer toutes sortes d’artifices, dans l’exaltation et la dépression, une sorte de mensonge et un jeu que l’on finit par se créer mais qui au final nous fait perdre la vie elle-même. C’est toute la complexité du moi et du bruit de l’esprit que chacun cherche à résoudre de mille manières. Mais à la base c’est uniquement parce que nous avons fini par prendre l’image pour la réalité elle-même, qu’on s’attache au temps. Comprendre et voir le mécanisme de création du temps suffit pour nous en libérer et ne vivre que dans l’instant.

Jean-Michel Jutge